Auteur(s)
Jonathan Quaderi
Contenu
Une patiente consulte un gynécologue en 2002 afin d’obtenir un deuxième avis, à la suite de la suspicion de léiomyosarcome annoncée par un autre gynécologue, lequel est au contraire rassurant avec un diagnostic moins sévère. L’anapath écarte également le sarcome en janvier 2003. La patiente retarde l’intervention jusqu’en 2004 et décède en 2009 d’un sarcome avec métastases pulmonaires après chimiothérapie intensive et plusieurs interventions chirurgicales.
La Cour d’appel de Riom avait débouté le veuf de son action en dommages intérêts pour perte de chance contre le gynécologue ayant donné le 2ème avis, par un arrêt du 16 janvier 2013 (qui n’a pas été publié ce qui empêche de connaître le détail de l’évolution des faits dans cette très intéressante affaire, les arrêts de cassation étant très réduits évidemment dans leur exposé puisque la Cour suprême juge en droit et ne réapprécie pas les faits). Toujours est-il que, par la décision commentée prononcée le 30 avril 2014, la Cour de cassation confirme l’arrêt de Riom et déboute le veuf de son pourvoi en jugeant que :
« Un médecin, tenu, par l’article R. 4127-5 du code de la santé publique, d’exercer sa profession en toute indépendance, ne saurait être lié par le diagnostic établi antérieurement par un confrère, mais doit apprécier, personnellement et sous sa responsabilité, le résultat des examens et investigations pratiqués et, le cas échéant, en faire pratiquer de nouveaux conformément aux données acquises de la science. »
La Cour de cassation est rarement saisie des responsabilités encourues en cas de deuxième avis médical, et la position de l’expert en l’espèce selon laquelle il conviendrait, dans un souci de prudence, de s’aligner sur le diagnostic le plus sévère, peut conduire à la mise en œuvre abusive de ce qu’on qualifie, dans d’autres domaines, le devoir de précaution.
Dans cette affaire, le 2ème avis, rassurant, était erroné, puisque l’évolution a montré le retard exposé au lancement des traitements. Mais il était intéressant que, sur des faits montrant l’erreur du deuxième consultant, la Cour de cassation réaffirme la liberté d’appréciation dans le cadre du 2ème avis. Le détail des investigations conduites n’étant pas publié, il ne peut être commenté c’est dommage.
Cette jurisprudence confirme la responsabilité autonome de chaque médecin dans le cadre de son exercice, en toute indépendance, avec la liberté de diagnostic et de prescription que le code de déontologie lui assure.
Source
La Lettre du Cabinet - Septembre 2014
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